Les Ultrabooks, les MacBook Air et les usages

Les Ultrabooks. Le nouveau dada de la presse (j’en fais partie) et des constructeurs, qui multiplient les publicités et les sorties. Un Ultrabook, c’est quoi ? En schématisant, même si Intel s’en défend, c’est un PC qui ressemble à un MacBook Air.

Un PC pas trop gros (11 à 14 pouces pour l’écran), avec une bonne autonomie, un SSD (dans 90 % des cas) et évidemment un processeur Intel. C’est souvent fin, plus ou moins réussi esthétiquement et surtout assez cher : entre 700 et 1 500 € (ou plus).

Pour Intel, c’est le futur (et ça fait vendre des processeurs). Pour les constructeurs, c’est le futur (et ça fait vendre des machines onéreuses). Pour les utilisateurs, c’est… pas tellement une bonne idée. Demandez à un utilisateur lambda (faisons cliché, votre mère) ce qu’elle veut comme ordinateur. Un grand écran pour regarder des films, un gros disque dur pour stocker des films et une batterie qui dans les faits va servir deux fois l’an dans le train ou pour aller montrer des photos à la grand-mère. Le contraire d’un Ultrabook en somme.

Croire que les utilisateurs veulent des disques durs de 128 Go, des écrans de 13 pouces et des ordinateurs esthétiques, c’est à mon avis se mettre le doigt dans l’oeil. Le design est accessoire pour une bonne partie des gens tant qu’il y a de jolies couleurs, le poids et l’épaisseur aussi. On sait parfaitement qu’une bonne partie des ventes se font sur des PC portables simplement parce que ça prend moins de place, pas stricto sensu parce que c’est portable.

Je peux me tromper, mais quand je vois que les constructeurs sont assez échaudés par le succès moyen des Ultrabooks (4 % des ventes alors qu’ils attendaient 40 %) et que sur Amazon, le premier Ultrabook (hors MacBook Air, j’en parle après) est 62e des ventes, il y a comme un souci.

Amazon, parlons-en : le top des ventes des ordinateurs portables est intéressant. Sur les 18 meilleures ventes (j’enlève volontairement le MacBook Air 13 pouces de la liste et un modèle indisponible), on trouve… un modèle 13 pouces, dix modèles 15 pouces et 7 modèles de 17 pouces. Je n’ai pas l’épaisseur et le poids, mais on doit être proche de 3 à 4 cm et 3,5 kg dans beaucoup de cas.

La capacité du disque dur ? Quinze modèles avec au moins 500 Go de disque dur, sept avec 750 Go.

Le prix moyen ? 475 €, soit la moitié du prix d’un Ultrabook correct.

Donc on a Intel et les constructeurs qui veulent nous vendre des ordinateurs fins, légers, avec de petits écrans et un petit espace de stockage et des utilisateurs qui achètent des briques avec un grand écran et un gros disque dur. Sans prendre en compte le prix, il y a comme un souci, non ?

Maintenant, prenons le cas Apple et regardons pourquoi le MacBook Air semble bien mieux se vendre que les autres. Enfin, semble, non, plutôt pourquoi il se vend mieux, même si c’est à mon sens artificiel.

C’est assez logique : Apple a une gamme pauvre. Pour 1 000 € chez Apple, c’est l’entrée de gamme, et c’est un MacBook Air. Si on veut autre chose, il vaut payer plus. Parfois beaucoup plus. Chez Asus, Acer et consorts, pour 1 000 €, on a du choix, beaucoup de choix. Et il y a des ordinateurs bien moins chers, quelques modèles plus onéreux, mais c’est rare.

Je suppute que les gens ne prennent pas un MacBook Air pour ses qualités intrinsèques, mais simplement parce qu’ils n’ont pas le choix s’ils veulent un Mac. Les gens n’achètent pas un 15 pouces ou un (feu) 17 pouces chez Apple parce que c’est (beaucoup) trop cher. La répartition des ventes chez Apple est artificielle, simplement portée par le marketing, et se baser sur cette répartition pour essayer de lancer des clones du MacBook Air, c’était tout simplement… une erreur.

Je crois que si les gens avaient le choix, i.e. la possibilité de prendre l’ancien MacBook ou un modèle 15 pouces au même prix, le MacBook Air 11 pouces se vendrait bien moins. C’est une bonne machine (j’an ai commandé un d’ailleurs), mais il n’est pas à mon sens adapté au grand public, même si on veut nous le faire croire.

Je crois que le marché des Ultrabooks va se tasser au fur et à mesure du temps, et qu’on va revenir aux fondamentaux : des machines équilibrées, pas trop onéreuses, bien équipées et surtout qui sont conformes aux usages. Pour moi, les Ultrabooks c’est un peu la même chose que les netbooks : un marché créé de toutes pièces, une bulle des ventes, mais au final simplement un nouveau (petit) segment du marché, pas du tout une révolution.

Je sais que beaucoup ne seront pas d’accord, que beaucoup croient que les Ultrabooks vont vraiment s’imposer, mais les chiffres sont là : en dehors des constructeurs qui pensent à leurs marges — encore que les Ultrabooks ne margent pas tellement en dehors de chez Apple —, qui peut sérieusement affirmer que les Ultrabooks vont faire 40 % des ventes en fin d’année ?