Récemment, je parlais des mises à jour d’iOS 9 et 10, pour corriger un problème de GPS. et je me suis dit que si le support d’Apple était très bon dans le temps, dans un sens il est aussi extrêmement mauvais, selon le point de vue. Plus exactement, il est à deux vitesses, avec une marche forcée assez gênante.
Si vous achetez un Mac (ou un appareil iOS, le fonctionnement est à peu près le même), vous avez l’assurance d’avoir des mises à jour de l’OS pendant plusieurs années. macOS Catalina (2019) fonctionne sur des Mac de 2012, iOS 13 prendra des appareils assez anciens comme l’iPhone 6S ou même l’iPad Air 2 (2015 et 2014 respectivement). Ce n’est pas parfait dans le meilleur des mondes pour les performances (iOS 12 qui marche bien sur un iPhone de 2013 reste plutôt une exception) mais dans l’ensemble le suivi de l’OS et des services reste plutôt bon. Et Apple fournit encore des mises à jour de sécurité pour les anciens OS assez régulièrement (Sierra et High Sierra pour le moment). Dans l’absolu, c’est mieux qu’Android : les fabricants de smartphones dépassent rarement quelques mois de mises à jour, quelques années étant considéré comme une exception. Il existe bien quelques fabricants qui suivent leurs produits longtemps (nVidia met à jour la Shield TV depuis quatre ans), mais c’est un effet collatéral d’un produit qui n’évolue pas réellement dans l’absolu. Sous Windows, Microsoft offre par contre un support assez long, avec tout de même quelques limites. Windows 7 (2009) est encore supporté quelques mois, Windows XP l’a été pendant 13 ans, etc. Mais il faut aussi prendre en compte qu’un nouveau PC ne fonctionnera pas sous Windows 7, que Vista et 8 ont été abandonné rapidement, etc.
Sans offrir un support parfait dans le temps, donc, le suivi reste plutôt bon chez Apple, même s’il ne faut pas se leurrer : le but est de garder le client captif pour les services qui rapportent de l’argent, donc éviter que les services en question s’arrêtent de fonctionner.
Un support à deux vitesses
Le problème de ces mises à jour, c’est que les systèmes évoluent vite, avec parfois peu de nouveautés – même s’il faut bien dire qu’il s’agit d’une posture de pas mal de gens de râler sur l’absence de nouveautés – mais surtout la disparition de pas mal de choses. macOS Catalina, qui arrive, va supprimer entièrement le support des applications 32 bits dans l’OS d’Apple (iOS l’a déjà fait avec la version 11). Il va aussi supprimer le support du HFS, et pas mal de choses sont obsolètes et donc en sursis. En pratique, les utilisateurs vont se retrouver devant un choix qui n’en est pas un : soit continuer à utiliser des applications pas si anciennes – il existe des sociétés qui vendent encore des logiciels 32 bits -, soit se passer à moyen terme des corrections de sécurité. Dans la même veine, ceux qui dépendent des applications 32 bits ne pourront pas se tourner vers de nouveaux Mac : quand un Mac sort, il ne supporte que l’OS courant (et les suivants) mais très rarement les précédents. C’est assez logique d’un point de vue business et ça pousse en partie l’adoption d’un nouvel OS, mais ça implique que les Mac qui sortiront en 2020 ne pourront pas lancer d’applications 32 bits. On peut penser ce qu’on veut de Windows, mais il reste raisonnablement possible de lancer des programmes 16 bits issus de Windows 3.x sur une machine moderne avec Windows 10 (en 32 bits, la version 64 bits ne le supporte pas). Pour des raisons historiques, Microsoft offre une rétrocompatibilité plutôt bonne, et ça change franchement des choix d’Apple.
Parce que le problème, c’est qu’Apple pousse en avant. Un Mac (ou un appareil iOS) ne peut généralement pas être downgradé, et les nombreuses sorties d’OS empêchent de facto de rester facilement sur un ancien système. Typiquement, les gens restés sous iOS 10 avec un iPhone ou un iPad pour garder des applications 32 bits ne reçoivent pas la mise à jour d’iOS 10 récente, qui n’est prévue que pour les appareils bloqués sous iOS 10. Et ne parlons pas des changements de normes, qui sont souvent expéditifs, que ce soit lors de l’ajout de l’USB, de l’USB-C, des écrans Retina, etc. Apple a aussi parfois un suivi un peu sélectif : l’AirPort Express de 2012 a reçu une mise à jour AirPlay 2 (un peu par surprise) quand l’Apple TV de la même année (3e génération) ne le propose pas.
Je suis dans ce dilemme actuellement : j’utilise encore des applications 32 bits très régulièrement, avec des logiciels qui ne passeront sûrement pas en 64 bits, en tout cas pas pour mon matériel. Je pense par exemple à EyeTV, mais il y en a d’autres. Même chose pour le HFS : la disparition du système de fichiers me bloque, parce que je dois régulièrement lire des CD en HFS. Ou l’AFP, qui va disparaître alors que le support SMB – malgré les années – reste plutôt perfectible. Et je suppose que les boîtiers Time Capsule que j’utilise risque aussi de poser des soucis à terme. Et Apple ne fait pas franchement d’efforts pour aider les gens bloqués (que la raison soit légitime ou pas). Alors que Microsoft proposait une solution de virtualisation intéressante sous Windows 7 pour Windows XP, il n’est même pas possible actuellement de virtualiser correctement un ancien Mac OS X. Ce n’est pas totalement de la faute d’Apple, mais en pratique l’idée de virtualiser une version de macOS compatible avec les applications 32 bits n’est pas envisageable tant les performances sont mauvaises et les fonctions absentes.
Je trouve ça très bien de proposer des nouveautés et un bon suivi pour la sécurité et ce qui est lié aux services, mais ça ne me gênerait pas qu’une forme basique de rétrocompatibilité existe tout de même. Et je sais qu’il peut s’agit d’un discours de vieux con, qui peut être vu comme rétrograde, mais proposer a minima une solution pour les applications 32 bits ne me semble pas hors de propos.
Je me demande dans quelle mesure les solutions de virtualisation permettront de continuer à utiliser les applications et matériels qui n’ont pas franchi le cap du 32-bit, et ont besoin de performances, notamment graphiques dans le cas d’EyeTV.
Bonjour Pierre,
Je suis entièrement d’accord avec toi.
Le meilleur exemple que j’ai de mon côté pour la « marche forcée en avant » d’Apple reste le cas des onglets ouverts sur Safari entre Mac et iOS:
Depuis le passage à iOS 11, je ne peux plus consulter les onglets ouverts sur mes iDevices à partir de mon Mac Mini (bloqué sous El Capitan) et inversement.
De mon côté, j’utilise toujours régulièrement mon PowerBook sous 10.4 pour contrôler un synthétiseur en Midi et enregistrer ma batterie électronique.
Je viens même de récupérer un iMacG5 dont je vais remplacer tous les condensateurs gonflés pour l’utiliser pour faire de la MAO (usage amateur bien entendu).
C’est vrai que parfois, je trouve que la stratégie de Microsoft est mieux tournée vers l’usager. Avec Microsoft, je trouve que le support LTS est bien meilleur.