Il y a quelques mois, je parlais des films accélérés à la télévision, et du problème du PAL speed up. Et j’expliquais que certains LaserDisc faisaient la même chose. J’ai donc trouvé un disque pour donner un petit exemple.
Je ne parle pas de LaserDisc PAL, qui sont accéléré à cause du transfert du cinéma (24 fps) vers les 25 fps d’un LaserDisc. Mais bien de films en LaserDisc, en NTSC, accélérés pour rentrer dans la longueur maximale d’un disque. La LaserDisc est un format analogique, avec des contraintes physiques fortes : chaque image prend une taille définie et il n’est pas possible de moduler la compression. Il existe différents modes d’enregistrement pour les LaserDisc, et le premier porte le nom de CAV. Dans ce mode, le disque tourne à une vitesse constante et chaque image prend physiquement un tour de disque. On peut stocker environ 30 minutes sur un disque NTSC, et comme un tour correspond à une image, on peut effectuer un arrêt sur image parfait. Le second mode, CLV, tourne à une vitesse variable, et chaque image prend physiquement la même longueur de piste. On peut donc stocker plus d’images (la piste est plus longue à l’extérieur) mais l’arrêt sur image propre n’est pas possible en analogique. On voit souvent qu’on peut stocker 60 minutes en CLV, mais ce n’est pas tout à fait exacte. En réalité, une bonne partie des disques « CLV » utilise du CAA, une méthode qui utilise des paliers pour la vitesse de rotation. Au lieu de la modifier graduellement, elle varie par étapes. Il existe plusieurs modes CAA, du CAA55 (~55 minutes) au CAA70 (~70 minutes). Le dernier mode date de la fin des LaserDisc et n’a jamais vraiment été utilisé, la limite réelle est vers 61 minutes (NTSC) et un peu plus de 63 minutes (PAL).
Au début des années 80, les modes permettant de stocker plus de 55 minutes n’existaient pas, et avant 1987, il n’était par exemple pas possible de stocker plus de 55 minutes avec de l’audio en numérique. Mais revenons au problème de l’accélération, qui est lié. Au début des années 80, donc, la limite pratique se situe entre 55 et 60 minutes par face, ce qui pose un souci : que faire avec les films qui font environ 2 heures, mais à peine plus ? Les éditeurs, pour éviter de devoir fabriquer deux disques pour un film (un LaserDisc possède deux faces) ont une idée : accélérer les films. On parle alors de films « Time Compressed », et c’est courant au début des années 80. En vrac, on trouve Battlestar Galactica (le film), qui fait 118 minutes au lieu de 123 minutes, certains James Bond, ou de vieilles éditions des premiers Star Wars, comme A New Hope (vers 1982) ou The Empire Strikes Back. Pour ce dernier, ils ont même enlevé les logos qui passent avant le film pour gagner quelques secondes. Dans tous les cas, on retrouve le symptôme du PAL speed up : une image un peu accélérée (peu) et un son légèrement plus aigu.
Pour mon exemple, je me suis procuré l’apprentie sorcière de Disney, dans sa version de 1983. La jaquette annonce 117 minutes, le film fait en réalité 113 minutes. Pour comparer, j’ai pris la version disponible sur Disney+, qui utilise le même montage. Il existe en effet différentes versions (plusieurs montages) du film, vous trouverez des infos sur le site « Les grands classiques », qui offre une analyse de la version standard (celle du LaserDisc, et disponible sur Disney+) et de sa version longue.
Et donc je vous propose quelques extraits (on va espérer que Vimeo ne bloque pas trop) pour bien comparer les deux et voir les différences de vitesse. On voit bien que le LaserDisc (en haut dans les deux scènes) est nettement plus rapide. Et à la fin, même si ça ne s’entend pas énormément, le son est un peu plus haut dans le second passage (le LaserDisc). L’accélération globale est assez faible : ~3,5 % et je n’ai aucune idée de la technique utilisée.
La technique a été utilisée sur les LaserDisc, mais aussi sur les CED (un autre format de disques contenant de la vidéo), au moins sur Star Wars. La page LDDB du film donne bien 118 minutes et 120 minutes pour les deux premiers. Le problème est exactement le même : les disques (avant 1984) se limitaient à 120 minutes, et la capacité a été augmentée plus tard (126 minutes en 1984). Sur les disques modernes (DVD, Blu-ray, etc.), le problème de la durée est plus rare. D’une part parce que la capacité de stockage est élevée, ensuite parce qu’il est possible de jouer (un peu) sur la compression pour que ça rentre. Ce choix peut poser des soucis de qualité (surtout quand on essaye de caser plusieurs bandes sonores) mais n’oblige pas à accélérer la vidéo.